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Le : 05/04/2013

 

Cour Administrative d’Appel de Marseille

N° 12MA01402

 

Inédit au recueil Lebon

 

5ème chambre - formation à 3

Mme SILL, président

 

Mme Eleonore PENA, rapporteur

M. SALVAGE, rapporteur public

 

OTTAN, avocat(s)

 

 

 

lecture du jeudi 14 février 2013

 

REPUBLIQUE FRANCAISE

 

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Vu la décision n° 336459 en date du 26 mars 2012 par laquelle le Conseil d’Etat a, d’une part, annulé l’arrêt de la Cour n° 08MA01766 du 10 décembre 2009 qui, faisant droit à la requête des sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud, a annulé le jugement n° 0630061 du 11 janvier 2008 du tribunal administratif de Nîmes rejetant leur demande d’annulation de la délibération du 25 octobre 2006 par laquelle son conseil municipal a modifié la dénomination du lieu-dit “ Les Bouillens “ en “ Source Perrier - Les Bouillens “, ensemble ladite délibération et, d’autre part, renvoyé l’affaire devant la même cour ;

Vu la requête, enregistrée le 1er avril 2008 au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille sous le n°08MA01766, présentée pour la société Nestlé Waters, dont le siège est 12, boulevard Garibaldi à Issy-les-Moulineaux (92130), représentée par son président directeur général en exercice, la société Nestlé Waters France, dont le siège est 12, boulevard Garibaldi à Issy-les-Moulineaux (92130), représentée par son président directeur général en exercice et la société Nestlé Waters Supply Sud, dont le siège est 12, boulevard Garibaldi à Issy-les-Moulineaux (92130), représentée par son président directeur général en exercice, par Me Lataste ; 

 

Les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud demandent à la Cour :

 

 

1°) d’annuler le jugement n°0630061 du 11 janvier 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la délibération en date du 25 octobre 2006 par laquelle le conseil municipal de Vergèze (Gard) a modifié la dénomination du lieu-dit “ Les Bouillens “ en “ Source Perrier - Les Bouillens “ et à ce que la somme de 10 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) d’annuler la délibération susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vergèze la somme de 17 500 euros à verser à chacune au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ; 

 

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ; 

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

 

 

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 janvier 2013 :

 

 

- le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

 

- les conclusions de Salvage, rapporteur public ;

 

 

- les observations de Me Lataste du cabinet Staci Chatain et associés, avocat, pour les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud ; 

- les observations de Me Soland de la SCP Christol et Inquimbert, avocat, pour la commune de Vergèze ;

- et les observations de Me Ottan, avocat, pour l’association pour la défense de la source Perrier ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 31 janvier 2013, présentée pour la commune de Vergèze par Me Christol ; 

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 4 février 2013, présentée pour les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud, par Me Lataste ; 

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 6 février 2013, présentée pour l’association pour la défense de la source Perrier, par Me Ottan ;

1. Considérant que, par une délibération en date du 25 octobre 2006, le conseil municipal de la commune de Vergèze a modifié la dénomination du lieu-dit “ Les Bouillens “ en “ Source Perrier - Les Bouillens “ ; que les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud, respectivement propriétaire de la marque commerciale “ Source Perrier “, exploitante de la source, et propriétaire d’un terrain situé au lieu-dit “ Les Bouillens “ sur lequel est implantée l’usine d’embouteillage de l’eau minérale naturelle de marque Perrier, ont contesté devant le tribunal administratif de Nîmes ladite délibération ; que, par jugement du 11 janvier 2008, le tribunal administratif a rejeté leur demande ; que, par un arrêt du 10 décembre 2009, la Cour a annulé le jugement et la délibération contestés ; que, par une décision rendue le 26 mars 2012 sur pourvoi de la commune de Vergèze, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt précité au motif que la Cour avait commis une erreur de droit en jugeant que la délibération du conseil municipal de Vergèze était entachée d’incompétence, sans rechercher si un intérêt public communal permettait au conseil municipal de procéder au changement de dénomination du lieu-dit situé sur le territoire de la commune sur le fondement des dispositions de l’article L.2121-29 du code général des collectivités territoriales, et a renvoyé l’affaire devant la Cour ;

 

Sur la régularité du jugement attaqué :

 

2. Considérant que, contrairement à ce qu’a estimé le tribunal administratif pour rejeter comme irrecevable la demande des sociétés requérantes, la délibération par laquelle un conseil municipal entend modifier la dénomination d’un lieu-dit constitue une décision administrative ; que le jugement en date du 11 janvier 2008 du tribunal administratif de Nîmes doit, par suite, être annulé ;

 

 

 

 

3. Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud devant le tribunal administratif de Nîmes ;

  

Sur la recevabilité de l’intervention de l’association pour la défense de la source Perrier en première instance :

 

4. Considérant qu’il ressort des statuts de l’association pour la défense de la source Perrier, qui intervient en défense au soutien des conclusions de la commune de Vergèze, que cette association a pour objet de défendre le patrimoine de la source Perrier ; que si ses statuts ne comportent aucune stipulation donnant à un organe la capacité de la représenter en justice, l’article 11 desdits statuts donne au conseil d’administration les pouvoirs les plus étendus pour gérer et administrer l’association, à l’exception des pouvoirs spécifiquement attribués à l’assemblée générale ; que le conseil d’administration était, en conséquence, compétent pour désigner, comme il l’a fait à deux reprises les 3 novembre 2006 et 3 novembre 2007, le président de l’association pour représenter celle-ci en justice ; que ces délibérations, prises par six membres du conseil d’administration en 2006, et cinq membres en novembre 2007, ont été valablement adoptées, l’article 12 des statuts prévoyant que les délibérations sont prises à la majorité des membres ; qu’ainsi, l’intervention de l’association pour la défense de la source Perrier doit être admise ;

 

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes du premier alinéa de l’article L.2121-29 du code général des collectivités territoriales : “ Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune “ ; que la source qui jaillit au lieu-dit “ Les Bouillens “ sur le territoire de la commune de Vergèze, eu égard à l’exploitation commerciale qui en a été faite depuis la fin du XIXème siècle à l’initiative du docteur Perrier qui en était alors propriétaire, constitue un élément fort du patrimoine historique et touristique de la commune ; que dès lors, l’inscription dans la toponymie locale du nom sous lequel la source est aujourd’hui connue présente un intérêt public pour la commune de Vergèze ; que le conseil municipal était par suite compétent pour modifier le nom du lieu-dit “ Les Bouillens “ en “ Source Perrier - Les Bouillens “ ; 

6. Considérant, en second lieu, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie ;

7. Considérant qu’aux termes de l’article L.2121-10 du code général des collectivités territoriales : “ Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions posées à l’ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, sous quelque forme que ce soit, au domicile des conseillers municipaux, sauf s’ils font le choix d’une autre adresse. “ ; et qu’aux termes de l’article L.2121-12 du même code : “ Dans les communes de 3500 habitants et plus (...) le délai de convocation est fixé à cinq jours francs (...) “ ; qu’il résulte de ces dispositions que les convocations aux réunions du conseil municipal doivent être envoyées aux conseillers municipaux à leur domicile personnel, sauf s’ils ont expressément fait le choix d’un envoi à une autre adresse, laquelle peut être la mairie, et qu’il doit être procédé à cet envoi dans un délai de cinq jours francs avant la réunion ;

8. Considérant que le respect du délai de convocation des conseillers municipaux aux réunions du conseil municipal qui a pour objet de leur permettre de prendre leurs dispositions pour être à même de participer aux séances et de disposer du temps nécessaire à la réflexion afin de délibérer en toute connaissance de cause sur les affaires inscrites à l’ordre du jour, constitue pour les élus une garantie qui découle des prérogatives que chacun d’eux tient personnellement de sa qualité de membre du conseil municipal ; qu’en l’espèce, les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud soutiennent que la commune ne justifie pas de l’envoi au domicile de chaque conseiller des convocations en vue de la réunion du 25 octobre 2006 dans les délais requis ; qu’avant la clôture de l’instruction, la commune n’a pas allégué que lesdites convocations avaient effectivement été envoyées au domicile des élus, alors qu’elle doit à l’inverse être regardée, eu égard à ses écritures, comme admettant que celles-ci ont été remises dans les bureaux des conseillers en mairie ; que dans ces conditions, la commune de Vergèze ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du respect des formalités exigées par les dispositions précitées, notamment de ce que les élus auraient expressément fait le choix d’un envoi à une adresse autre que leur domicile et que lesdites convocations ont bien été distribuées cinq jours francs avant la date de la réunion ; que, par suite, et alors même que les conseillers municipaux concernés auraient été présents ou représentés lors de la séance, la méconnaissance de ces règles, qui a privé les membres de l’organe délibérant de la commune d’une garantie, a constitué une irrégularité de nature à entacher la légalité de la délibération attaquée ;

 

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud sont fondées à soutenir que la délibération attaquée a été adoptée dans des conditions irrégulières et à en demander l’annulation pour ce motif ; 

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

 

10. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de l’article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Vergèze une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud prises solidairement et non compris dans les dépens ;

 

 

 

11. Considérant que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que les sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, versent à la commune de Vergèze la somme que celle-ci réclame sur leur fondement ;

12. Considérant, enfin, que les dispositions de cet article ne sauraient recevoir application au profit ou à l’encontre d’une personne qui a la qualité d’intervenant à l’instance et ne peut-être regardée comme partie à cette dernière ; qu’ainsi, les conclusions présentées sur ce fondement par l’association pour la défense de la source Perrier et dirigées contre les requérantes doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

 

Article 1er : L’intervention de l’association pour la défense de la source Perrier est admise. 

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 11 janvier 2008 et la délibération en date du 25 octobre 2006 du conseil municipal de Vergèze sont annulés. 

Article 3 : La commune de Vergèze versera aux sociétés Nestlé Waters, Nestlé Waters France et Nestlé Waters Supply Sud, prises solidairement, une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Vergèze et de l’association pour la défense de la source Perrier tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nestlé Waters, à la société Nestlé Waters France, à la société Nestlé Waters Supply Sud, à la commune de Vergèze et à l’association de la défense pour la source Perrier.

 

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N° 12MA01402 2

 

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 Abstrats : 01-03 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Forme et procédure.

 

135-02-01-02-01-01-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Fonctionnement. Convocation.

 

135-02-01-02-01-03-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Délibérations. Délibérations intervenues à la suite d’une procédure irrégulière.